REFLEXes

Ces jeunes fachos qui, peut-être, nous gouverneront…

7 décembre 2006 Les institutionnels

L’évolution électorale du Front national n’est pas l’élément le plus important pour jauger la progression du parti et encore moins pour juger de l’évolution des nationalistes et fascistes, de la diffusion de leurs idées. Mais l’évolution des stratégies du FN montre la progression idéologique du parti ainsi que son ascension sur l’échelle du but toujours présent : l’arrivée au pouvoir.

Publié en juin 1993

Depuis sa création en octobre 1972, le FN semble persuadé qu’il trouvera son électorat dans les couches dites populaires de la société et développe la stratégie adéquate.

Message simple («CSG : je paye, tu payes, ils touchent !» désignant par là même le bouc émissaire) et politique de comptoir, le plus souvent basée sur l’affect («La vie d’un criminel compte-t-elle plus que celle d’un enfant ?»). Cette stratégie donnera des résultats mais elle n’apportera que peu de cadres au parti en lui-même.

Jusque-là hostile aux implantations en milieu culturel, à la différence de la Nouvelle droite, le FN, inquiet du manque de renouvellement de ses cadres, a finalement décidé d’aller les chercher, comme tous les autres partis, dans les lycées, universités et grandes écoles.

C’est donc fort logiquement qu’en août/septembre 1987, J.M Le Pen et Carl Lang (ex-président du FNJ), décident de s’implanter réellement au sein de la jeunesse en créant dans les facs et les lycées des organisations proches du FN, capables de divulguer leurs idées mais surtout capables de recruter des militants, futurs cadres du parti lorsqu’il «arrivera au pouvoir».

Peu habitué aux implantations de ce style, le FN par l’intermédiaire du Front national de la Jeunesse (organisation créée en 1974 mais qui vivotera jusqu’à la percée de Le Pen) préfère dès 1987 infiltrer l’organisation de droite-extrême, très proche du RPR, qu’est l’UNI (Union nationale inter-universitaire). Cette stratégie permettra de prendre conscience des réalités du milieu éducatif, de préparer une stratégie de séduction différente de celle plus simpliste développée dans les quartiers, mais aussi, de créer les futures conditions d’implantation d’organisations officiellement rattachées au FN. Il faudra entre autres faire éclater au sein de l’UNI des débats et dissensions capables d’influencer, de créer des fractures, de radicaliser une partie de ses militants, de BANALISER les idées d’extrême droite…

Cette stratégie se traduira par l’élection, en 1991, 1992 et 1993 à Brest, de la présidente du FNJ local, candidate du FN pour les municipales de 1989 et les cantonales de mars 1992, en tant que représentante de l’UNI au conseil d’UFR de droit. Il faut ajouter à cela l’infiltration de groupuscules d’extrême droite style le GUD (Groupe union défense / Droit), le GAJ (Groupe action jeunesse)…

Mais l’activité des nationalistes frontistes ne se limitera pas à une simple infiltration puisque, durant près de trois ans, ils vont rédiger un programme pour un Renouveau lycéen et étudiant (R.L – R.E). On verra alors apparaître, on ne sait par quel miracle (UNI), des tracts et brochures signés Renouveau étudiant, nettement plus radicaux. Aucune raison de croire à l’époque, pour quelqu’un de non averti, que c’est un sous-marin du FN tellement le discours en est différent, et la thèse du nouveau groupuscule est la plus souvent retenue. Fait éminemment étrange, aucun contact ni adresse ne figure en bas de ces documents durant ces trois années. Ce n’est qu’en 1990 que l’on verra apparaître l’adresse de la rue de la Clergerie, ex-siège du FN, mais on est alors entré dans la deuxième phase d’implantation.

Cette première étape aura donc vu l’infiltration de l’UNI comme base arrière, permettant la banalisation des idées du FN et capable de créer par la suite les conditions d’implantation des futures organisations frontistes (stratégie d’ailleurs appliquée au niveau national envers le RPR[1] )). La radicalité des propos tenus par Renouveau étudiant a ainsi ouvert le chemin de la banalisation au FN dont le discours ne choquera pas, apparaîtra comme raisonnable en comparaison de celui de Renouveau.

Mais c’est également une période de prise de contact avec les organisations «à la droite de l’UNI» et le départ de la constitution d’un réseau reliant les différents groupes de la droite radicale mais également le monde des jeunes (lycées, facs, organisations culturelles…) et celui du FN, par l’intermédiaire du Conseil scientifique, de l’Institut de formation nationale et des Cercles (entreprises, cabinets, professions…)

C’est en septembre 1989 que J-M Le Pen et Carl Lang décideront qu’il est «maintenant temps d’entendre la voix de la droite nationale dans les lycées et universités», c’est à dire en clair, de passer à la seconde étape d’implantation.

« Alors que 18% des jeunes Français ont fait confiance à J.M Le Pen en 1988, il est maintenant temps que tous les étudiants nationalistes, d’où qu’ils viennent, se fédèrent pour réaliser ce véritable barrage à la gauche et à la droite toujours trop molle » (Martial Bild, président du FNJ, 11 mai 1990).

Il va ainsi naître une fédération de groupes nationalistes au sein des universités et lycées, et cela en dépassant le cadre trop étroit du FN. Cette exigence prend en compte la réalité des implantations nationalistes dans les universités et affirme déjà un constat d’échec sur les capacités d’implantation du FN en milieu culturel.

Mais l’évolution du Réseau semble ensuite facile et rapide et prend son véritable essor lors du Congrès du FNJ de 1990, date à laquelle tous les FNJ prétendent «travailler à pied d’oeuvre pour réaliser cette coordination». Le rapport des villes «bénéficiant» d’une implantation du FNJ est dans son ensemble plus que positif puisque chaque ville prétend avoir fédéré en moyenne trois groupes jusque-là isolés, rivaux… (L’Étincelle juillet 1990)
Ce résultat se confirme tout d’abord à la vue de la décomposition de l’UNI qui perd ses adhérents au profit du FN tout en radicalisant son discours et ses actions. À Sceaux (Hauts-de-Seine), les effectifs militants de l’UNI (une quinzaine) sont tombés à cinq alors que l’AEI, appellation locale du Renouveau, créée en février 1990 par Michel Murat[2], engrangeait une cinquantaine d’adhérents. À Nancy, le responsable local de l’UNI représentait le FN aux cantonales de mars 1992. Tandis qu’à Montpellier (Hérault), toute l’UNI, président en tête, passait dans le camp lepéniste !

Mais le résultat se voit également à la vue du rapprochement de groupes d’extrême droite jusque-là rivaux. C’est entre autres le cas du GUD qui bénéficiait jusque-là d’un rapport de force en sa faveur (il mettait des claques aux «bouffons du FNJ»). Il se montrera par la suite très docile, allant même jusqu’à servir de «troupe de choc» lorsqu’il s’agira d’imposer la présence d’une organisation frontiste en faisant régner la peur. L’aboutissement de cette union, verra des membres du Renouveau parisien et du GUD, attaquer ensemble le 16 février la fac de Nanterre, et le 31 mars la fac de Tolbiac.

Cette stratégie ne s’est bien évidemment pas décidée démocratiquement entre tous les FNJ puisque Carl Lang avait nommé, quelques mois plus tôt, «au mérite» Christophe Degrave charger de lancer et défendre l’idée d’un réseau reliant tous les groupes d’extrême droite, quels que soient les courants dont ils font partie, et ainsi placer des organisations nationalistes dans toutes les universités.

Pourquoi Degrave ? Pour la simple et unique raison qu’il est le meneur du groupe de «francs-tireurs» qui, sous le nom de Liste indépendante des étudiants de droite (LIED), ont rapporté au FNJ ses premiers succès électoraux (1990). En plaçant 11 élus dans différents conseils avec près de 30% des voix en droit et plus de 50% en médecine, le groupe rouennais montrait le chemin à suivre. «Jusqu’ici nous avions mal appréhendé notre capacité à nous implanter dans le milieu universitaire mais aujourd’hui nous sommes en droit d’affirmer qu’en 1991 nous serons présents dans toutes les universités» (M.Bild).

C’est donc au mérite que Degrave est d’un coup propulsé à la tête du programme d’implantation du FNJ qu’il va mener avec tout «l’enthousiasme nationaliste» qui le caractérise !

Développant, peut-être trop d’ailleurs, l’idée d’une confédération de tous les groupes d’extrême droite quelles que soient leurs tendances, on verra naître dans les années 1992 et 1993 des fédérations régionales.

C’est fort logiquement le cas à Lyon où va naître le Cercle national des étudiants de Lyon (CNEL). Dans une ville où les universités sont parfois fréquentées par des enseignants révisionnistes ou membres du FN, il n’a pas été dur de mettre en pratique les bonnes idées de Degrave. Il est, paraît-il, essentiel de «repérer dans un premier temps les gauchistes puis de prendre contact avec le personnel enseignant ou administratif, souvent proche de nous en droit et en économie». Ce sera effectivement le cas à Lyon, où le FNJ local se servira des profs en les invitant à des meetings sur des thèmes aussi divers que «l’école unique et le mythe égalitaire» ou «l’Europe entre Identité et Indépendance». Et les profs de les remercier en organisant avec l’aide du Centre d’histoire et d’analyse politique de l’Université de Lyon III, des colloques réunissant des membres du GRECE et des intégristes catholiques proches du FN[3].

Des profs ! Non, rassurez-vous, ce ne sont que Bruno Gollnisch-Flourens, membre du Bureau politique du FN, directeur national aux études et argumentaires, adhérent du Cercle Renaissance depuis 1973, et Pierre Vial[4], 50 ans, pilier du GRECE depuis sa création, professeur agrégé d’histoire médiévale, conseiller régional Rhône-Alpes, conseiller municipal de Villeurbanne, membre du Comité central du FN, de la Direction générale, du Comité national des Français juifs, du Centre d’études et argumentaires (CEA) et responsable du social au sein du FN. Certes, ils sont tous deux profs à l’Université de Lyon III, membres du Conseil scientifique du FN et chargés d’aider Degrave pour l’assaut du FNJ sur les facs ! Ils peuvent également compter sur les précieuses aides de Georges Pinault[5] et Bernard Notin[6], également profs à l’université de Lyon III.

C’est ensuite le cas à Paris où naît le 27 février 1990, dans les locaux d’Entreprise moderne et Liberté[7], le Cercle national des étudiants de Paris (CNEP), comprenant le Cercle national des grandes écoles, le Cercle national Science-Po, l’Union des étudiants de droite (UED) d’Assas et de Malakoff ainsi que l’Association indépendante des étudiants de Sceaux (AIE). Le cercle parisien est en 1990 dirigé par Régis le Poitevin de la Croix-Vaubois, Habib Haddad (appelez-moi Richard !), Claude Baret du Couderc, Nathalie Stirbois, Marine Le Pen…

Progressivement le CNEP va s’agrandir avec le Cercle national Dauphine (avril 1991), le Cercle national Sorbonne (février 1991) et va engranger quelques succès électoraux jusqu’à l’élection en mars 1991 de Régis Le Poitevin de la Croix-Vaubois au Conseil régional des oeuvres universitaires et sociales (CROUS) avec 7% des voix. Cette date sonnera d’ailleurs le début de la débâcle.

En effet l’année suivante, fort de ses résultats électoraux, le CNEP tentera de prendre les autres facs de Paris. Il essaiera ainsi de créer le Cercle national Nanterre avec l’espoir de se présenter aux élections. Sachant la tâche difficile, c’est Marie-Laurence Ginisty, ex-présidente du Cercle national Dauphine (maîtrise de gestion) et Habib/Richard Haddad, principal animateur du CNEP depuis deux ans puisqu’il est chargé de mission au FNJ et responsable de l’argumentaire, qui se chargeront de l’implantation.

Mais c’était faire un pas de trop et cette nouvelle tentative d’implantation allait soulever un élan de dénonciation et d’opposition. Les élections universitaires de Nanterre furent annulées par deux fois par les antifascistes radicaux de Paris, alors qu’à Assas et à la Sorbonne, le CNEP (CNS) se prenait une formidable gifle électorale ! (cf tableau)

Tant qu’ils se contentaient d’être présents dans les facs plutôt de droite, ils surclassaient leurs camarades de l’UNI et ne dérangeaient pas trop mais dès qu’ils eurent envie de s’agrandir, la réaction a permis de mettre au grand jour l’arrivée du FN dans les facs et a interdit le chemin de la banalisation aux nationaux frontistes.

Aujourd’hui, le Cercle parisien semble donc avoir du mal à trouver son second souffle et à conserver son unité.

Reste que cette expérience aura formé bon nombre de militants, de cadres qui, leurs cursus universitaires aujourd’hui terminés, militent au FN.

Fini le temps des petits, ce sont aujourd’hui de vrais «hommes politiques» !

On revoit alors Régis le Poitevin de la Croix-Vaubois, 25 ans le 24 juin, habitant du 16ème arrondissement de Paris, conseiller régional FN dans la Nièvre, assistant parlementaire diplômé de l’IEP (Science-Po), administrateur au CROUS et successeur en tant que président d’honneur du CNEP de Marine Le Pen. Il faut dire que ce dernier est adhérent au FN depuis 1984, il avait 15 ans et demi !

Quant à Marine Le Pen, elle était candidate du FN aux dernières élections à Neuilly-sur-Seine. Alors que Michel Hubault, 30 ans, licencié d’histoire à la Sorbonne, lieutenant de réserve (Prytanée militaire), membre fondateur du Cercle Science-Po, préfère militer au sein du groupe des Droites européennes.

Martial Bild (31 ans), est lui adhérent du FN depuis 1980, licencié d’histoire à l’Université de Tolbiac, il collectionne les postes puisqu’il est membre du Bureau politique du FN, attaché parlementaire européen, conseiller régional d’Île-de-France, conseiller municipal de Rosny-sous-Bois, animateur de la Radio Le Pen, secrétaire général à l’information et à la communication interne, délégué national aux actions catégorielles et trésorier du Mouvement Jeunesse d’Europe ![8]

N’oublions pas bien sûr, Samuel Maréchal, président du FNJ depuis novembre 1993, présent depuis plusieurs années sur les listes électorales du FN à Nantes puisqu’il est le petit protégé de René-Marie Bouin[9]. Quant aux futures promotions, il semble que Gwënael Le Brazidec ait, avec l’échec de Habib Haddad, le vent en poupe au sein du FN et pourrait devenir (s’il se tient bien !), responsable de l’Île-de-France.

Mais cette liste est bien loin d’être exhaustive[10], ce qui porterait à dire qu’au-delà des reflux électoraux que l’ensemble du FNJ a pu enregistrer ces derniers temps, le FN trouve aujourd’hui un écho chez les jeunes et remplit ainsi son objectif de trouver et former de jeunes cadres, futurs dirigeants du parti.

Comment ne pas s’étonner de tels résultats lorsque l’on connaît la réticence du FN à s’implanter dans des milieux culturels, la pauvreté et la simplicité des réflexions qu’il mène sur le système éducatif et la forte place déjà tenue par des groupes rivaux comme le GUD ? La rapidité des réponses données à ces problèmes et l’évolution stratégique qui s’est ensuite opérée sont des facteurs bien plus importants pour juger de l’évolution idéologique et de l’enracinement du parti. C’est dans une analyse largement différente que le FNJ a réussi à s’implanter de façon à trouver rapidement des cadres.

Certes, le but poursuivi par le FNJ n’était d’emblée pas le même que celui du FN puisque ce dernier court, comme les autres partis, après quelques voix éparpillées par-ci par-là, alors que le FNJ sert à former les futurs cadres et a pour objectif de faire avancer les idées et les valeurs du Front en les faisant connaître, version intellectuelle, à la future élite de la nation. Familiarisant, banalisant ainsi la présence et les idées d’un mouvement d’extrême droite dans l’aquarium universitaire, dans le monde culturel. L’obtention d’une représentativité électorale ou le nombre d’actions menées ne peuvent plus être les seuls critères pris en compte. Les professeurs[11] et les personnels administratifs affirment de plus en plus ouvertement ou revendiquent, avec fierté, d’être du FN ou proche du FN. Ils n’hésitent plus non plus à prendre la parole dans des meetings, à donner leurs précieux avis au président de la fac lorsqu’il s’agit de sécurité, de drogue, d’invasion d’étudiants étrangers, à tenir des propos racistes ou révisionnistes. Autant ne pas parler de leurs cours !

Ce n’est donc plus dans les instances de pouvoir du type conseil d’administration qu’il faut s’enquérir de la nuisance frontiste mais plutôt dans les lieux d’influence, là où s’élaborent les recherches, les décisions, là où se forme l’élite de demain. Laissant ainsi, un temps soit peu, de côté la bonne vieille violence qui doit «faire peur» et «ouvrir le passage», il apparaît semble-t-il plus intéressant de tenter de pénétrer dans ces hautes sphères et tenter de rendre culturellement hégémonique la pensée d’extrême droite. Rien n’empêche bien sûr, quand la cause le mérite, d’avoir recours à des opérations «coup de poing». Ce fut ainsi le cas à Tolbiac et à Nanterre où, poursuivis par des antifascistes parisiens, neuf militants du CNEP et du GUD, dont Lalun, De Molder et Puisségurd, seront interpellés par la police avec barres de fer, flingues à grenailles et tracts du CNEP.

Ainsi les FNJ, tout en n’abandonnant pas totalement le militantisme de papa, semblent considérer qu’étant censés s’implanter dans un milieu culturel ils doivent adopter une stratégie spécifique, proche de celle de la Nouvelle droite. Alain de Benoist, membre fondateur du GRECE (Groupe de recherches et d’études pour la civilisation européenne), étroitement lié à la Nouvelle droite, a toujours considéré qu’il fallait influencer l’orientation idéologique de la société et être présent là où se façonne l’opinion publique, à commencer bien évidemment par les médias, mais aussi les universités et grandes écoles ! Le GRECE se dotera alors de deux revues, Nouvelle École puis Éléments, en en faisant des lieux de rencontre et de discussion, des «laboratoires idéologiques», destinés tant à attirer les sympathisants de droite qu’à séduire les soi-disant adversaires de gauche.

Le FNJ tentera de faire de même avec la revue des Droites européennes, L’Europe des Patries et son bulletin interne L’Étincelle. On y verra des auteurs comme Vial, Mabire, Yves Dupont[12]) et Alika Lindbergh[13] mais également des jeunes du FNJ comme Claude Baret du Couderc et Christophe Degrave y faire l’éloge du racisme différentialiste, de «l’intégrisme de la différence».

N’oublions pas non plus que la Nouvelle droite a depuis longtemps trouvé une audience dans les universités où elle a mis en place des réseaux inter-disciplinaires qui organisent des colloques. Ainsi, c’est de Lyon que partira la dynamique des jeunes frontistes sur les facs, là où ces réseaux montrent, avec la précieuse aide de Vial et Notin, le plus d’efficacité.

Mais les similitudes ne s’arrêtent pas là, car lors de la percée du FN dans les années 1980, la «nouvelle culture», appelée par ses adversaires, «Nouvelle droite» subira de sérieux revers.

D’après le livre de Camus et Monzat[14] la Nouvelle droite a été pillée idéologiquement par le FN avec entre autres, l’arrivée des solidaristes de Stirbois incluant certains éléments fascistes, et elle semble aujourd’hui avoir réagi à cette situation en développant deux axes majeurs :

• tenter d’influencer malgré tout l’orientation idéologique du FN, à défaut de pouvoir en contrôler la direction. Ainsi, selon Monzat, «le GRECE apparaît de facto comme un des trois piliers de l’école de formation du Front national, avec l’équipe de Présent et avec les membres du Club de l’Horloge : il joue donc un rôle significatif dans l’équilibre interne du parti». Et Monzat communique une liste des membres du GRECE appartenant aussi au «conseil scientifique» et à l’Institut de formation nationale du FN. Ces deux groupes entretiennent des rapports privilégiés avec le FNJ dont ils forment les militants lors de «stages de formation». Tout comme l’Université d’été du FNJ, ces stages se déroulent le plus souvent à Neuvy-sur-Barangeon dans la résidence de Roger Holleindre avec comme principaux professeurs Pierre Vial, Jean-François Jalkh[15], Chritaine Pigacé, Jean-Claude Bardet, rédacteur en chef d’Identité (revue du Conseil scientifique).

• poursuivre son objectif de toujours par l’intermédiaire autonome d’Alain de Benoist et de sa revue Krisis c’est-à-dire rendre hégémonique la pensée de la Nouvelle droite en obtenant une caution et une légitimité pour la culture fasciste qui est la sienne.

Les similitudes de stratégie et de discours entre les jeunes du Front national et les païens du GRECE ne sont donc pas le fruit du hasard et on comprend mieux comment les petits jeunots du FNJ ont fait pour fédérer des groupes nationaux-révolutionnaires jusque-là rivaux, tout en arrivant à se servir d’eux comme troupes de choc !

Mais elle montre également comment, par l’intermédiaire du Conseil scientifique, de l’Institut de formation nationale et des cercles d’entreprises, tous trois chargés de la formation de la future élite du FN, la Nouvelle droite se met en place pour prendre (tel reste son but inavoué) la direction du FN.

Reste qu’aujourd’hui, cette influence de la Nouvelle droite, relayée par une étonnante volonté de collaboration entre tous les courants parfois rivaux, représentés dans ces différents groupes[16], est en train de donner au FN les capacités de devenir un parti de pouvoir.

On ne peut par conséquent, se réclamer antifasciste et croire, par exemple, «qu’un vote massif aux élections universitaires interdira toute implantation fasciste sur notre faculté» ou bien encore «qu’il faut faire confiance aux citoyens, à la démocratie !»

Désolé pour ceux qui lisent et se sentent visés (UNEF-ID) mais vos espérances dans un front démocratique et votre antifascisme de pacotille qui en découle, sont largement dépassés car la démocratie et la liberté d’expression sont les deux piliers essentiels sur lesquels le Front s’appuie pour banaliser ses théories, idées et valeurs ! Ajoutez à cela, l’appui idéologique du GRECE…

La stratégie choisie par les antifascistes parisiens lorsqu’ils se sont réunis et organisés afin d’interdire toute banalisation, tout discours voire même compromis avec l’extrême droite par tous les moyens, comme ce fut le cas à Nanterre, a montré son efficacité. Interdire toute implantation, banalisation des jeunes frontistes, c’est éviter, un tant soit peu, que demain ils nous gouvernent…

Mis en ligne le 7 décembre 2006

  1. Pour exemple, du 13 au 16 novembre 1989 se tiendront à Nice les premières Assises internationales de la désinformation (IED), grâce à la précieuse aide et aux interventions de Jacques Médecin, Martine Daugreilh et Pierre Médecin, tous trois membres notoires du RPR (cf Camus et Monzat,. p.358[]
  2. Responsable du Renouveau étudiant et membre du directoire du FNJ[]
  3. Ce sera en effet le cas au mois de mai 1989, lors d’un colloque sur le thème de «Révolution contre révolution», réunissant une vingtaine de militants de premier rang du GRECE (Jean-Paul Allard, Jean Haudry, Jacques Marlaud, Bernard Notin, Pierre Vial…) et des catholiques intégristes (Etienne Couvert, Brigitte Horiot, Bernard Lafargue, Jean Vaquié). Ils y exposeront les convergences possibles du discours anti-révolutionnaire des deux courants. Seul spécialiste universitaire du sujet, Jean Tulard apporte la caution de son autorité en quatre courtes pages sur Joseph de Maistre.[]
  4. Pierre Vial dira de Robert Dun, ancien SS et membre du Groupe druidique des Gaules : « C’est un sûr compagnon de route et de combat. C’est aussi un homme habité par cette flamme intérieure qui fait vivre quelques-uns d’entre nous. ». Décidément, Vial aime les jeunes puisqu’il est également fondateur du mouvement de scoutisme du GRECE, Europe Jeunesse créé en 1975 ![]
  5. Collaborateur de Nouvelle École, Goulven Pennaod, alias Georges Pinault, a été chargé d’enseignement à l’université de Lyon III puisqu’il est spécialiste de linguistique celtique. Compagnon de route d’Europe Action, militant national-socialiste, collaborateur du Devenir européen, de La Bretagne réelleet druide, on retiendra ce passage de l’un de ses articles dans la Bretagne réelle : « Nous haïssons la France d’une haine rabique et définitive, le chancelier Adolf Hitler était un grand homme et l’exemple du XXème siècle, le christianisme et les autres juiveries devaient être détruits (…)».[]
  6. Malgré les nombreux titres révisionnistes et autres qu’il a déjà, Bernard Notin est l’un des membres les plus actifs du GRECE.[]
  7. Entreprise moderne et Liberté est une association satellite du FN présidée par Jean-Michel Dubois et dont le secrétaire général est André Dufraisse. Cet ancien permanent du Parti populaire français de Doriot, puis de la LVF (Ligue des volontaires français contre le bolchévisme), né le 8 Août 1918 et adhérent du FN depuis 1972 est aujourd’hui membre du Bureau politique du FN. Sa femme, Martine Lehideux, née le 27 Mai 1933 et adhérente du FN depuis 1972, nièce de François Lehideux, ministre du travail de Pétain et président de l’Association pour défendre la mémoire du Maréchal Pétain (ADMP) est, quant à elle, membre du Bureau politique du FN, du conseil d’administration d’Entreprise moderne et Liberté, conseiller régional d’Île-de-France, et présidente fondatrice du Cercle national des femmes d’Europe[]
  8. Mouvement créé en même temps que le Renouveau étudiant en 1987 à l’initiative de Carl Lang, Yves Dupont, Martial Bild et Jean-Pierre Gendron. Tous sont aujourd’hui membres du Bureau politique du FN ![]
  9. René-Marie Bouin : secrétaire départemental du Morbihan, secrétaire régional dans les Pays de Loire en tant qu’élu de Loire-Atlantique et président de la Fédération nationale des étudiants de France[]
  10. Suite au prochain numéro… ![]
  11. Jean-Claude Soyer, prof à l’Université de Paris II et Georges Lane, maître de conférence à l’Université de Dauphine, tous deux membres du Club de l’Horloge, seront des plus actifs.[]
  12. Ce professeur, né le 26 Juin 1957 et adhérent du FN depuis 1975 est aujourd’hui animateur national, secrétaire départemental et conseiller régional de l’Eure, membre du Comité de soutien à J-M Le Pen et secrétaire du Mouvement de la jeunesse d’Europe (MJE[]
  13. Présidente du Cercle national pour la défense de la vie, de la nature et de l’animal, fondé en 1985. Figurent notamment au comité d’honneur du cercle : le professeur Théodore Monod (membre de l’Académie des Sciences, professeur honoraire au Muséum), Madame Pierre-Paul Grassé, veuve du professeur membre de l’Académie des Sciences, Bruno Laure, président de la ligue antivivisectionniste Défense des animaux martyrs (LAF-DAM). Sans oublier l’aide apportée par Brigitte Bardot qui dénoncera dans un article de Présent les cruautés des abattages rituels juifs et musulmans…[]
  14. Les droites nationales et radicales en France (PUF), Jean-Yves Camus et René Monzat.[]
  15. Jean-François Jalkh est lui aussi, après Jean-François Touzé, un ancien président du FNJ. Ce journaliste, né le 23 Mai 1957 et adhérent du FN depuis 1974 est aujourd’hui conseiller régional d’Île-de-france, conseiller municipal de Melun, secrétaire national aux élections et aux sondages, membre de l’Institut de formation nationale, du Comité central et du Bureau politique du FN depuis 1981. Il a également écrit en collaboration avec J.P Stirbois le «Dossier Immigration».[]
  16. On retrouve en effet la présence d’individus de toutes tendances aussi bien au sein du Conseil scientifique que de l’Institut de formation nationale. Ainsi, notons la présence de Chritaine Pigacé, Pierre Vial et Jean-Claude Bardet du GRECE, Georges Paul Wagner, monarchiste, Françoise Monestier, Pierre Durand de Présent, Yvan Blot du Club de l’Horloge, Pascal Gannat issu de Chrétienté-Solidarité…etc.[]
Cet article est libre de droit, mais nous vous demandons de bien vouloir en préciser la source si vous en reprenez les infos : REFLEXes http://reflexes.samizdat.net , contact : reflexes(a)samizdat.net

Vous aimez cet article ? Partagez le !

Les commentaires sont fermés.