REFLEXes

Historique

26 février 2003 Non classé

L’origine kurde est encore aujourd’hui une problématique contreversée entre scientifiques, historiens et linguistes. C’est avec la révolte (21 mars 612 av JC) contre le pouvoir assyrien que les Kurdes fêtent communément leur jour de libération : le Newroz ou nouvel an kurde. En 1919-22, Mustapha Kémal, (fondateur de la Turquie), proclame un «État turc homogène», interdit les écoles religieuses (kurdes au Kurdistan) et la langue kurde. Après de nombreuses révoltes, suivies de répressions turques entre 1925 et 1960, ainsi que des transferts massifs des populations kurdes vers 1’Ouest, naissent des partis d’inspiration «marxiste-léniniste»,
En 1978, l’un d’eux, le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan), proclame la lutte armée et la terreur révolutionnaire contre la droite turque et les féodaux».
En septembre 1980, l’armée prend le pouvoir, la constitution ne permet aucune liberté d’expression, de réunion, d’association pour les Kurdes : parler kurde devient un délit.

En 1984, le gouvernement met en place une milice kurde de «protecteurs de villages» et place les onze provinces du sud-est sous régime militaire, avec un super-préfet à Diyarbakir, qui a les pleins pouvoir.

En août 1990, la convention des Droits de l’Homme est suspendue pour cette région.

En avril 1991 passe une loi anti-terreur : revendiquer l’identité kurde est un crime contre l’État turc. Les députés du HEP (Parti du Travail du Peuple) demandent une solution politique au problème. Le Procureur de la Cour de Sûreté de l’État leur répond en les traînant en justice, pour «séparatisme».

En 1993, le HEP devient le DEP (Parti de la Démocratie), et la même année, Tancu Ciller est nommée premier ministre et donne carte blanche à l’armée, en affirmant «qu’il n’y a ni Kurdes, ni problème kurde en Turquie», mais «un problème de terrorisme qu’il faut éradiquer avec force».

Entre 1992 et 1993, 74 dirigeants nationaux ou régionaux du DEP ont été assassinés, ainsi qu’un de leur député.
Au cours de 1’année 1994 est votée à Ankara la levée de l’immunité parlementaire de six députés du DEP, d’autres, de retour du Parlement européen de Strasbourg, ont été arrêtés et condamnés à quinze ans de prison.

Le bilan de l’année 1994 montre clairement la volonté de la part de la Turquie de résoudre le problème kurde, et ce de façon radicale. 35 millions de francs ont été dépensés par l’armée en un an, pas moins de trente mille soldats ont été envoyés dans les zones kurdes, plus de deux mille villages ont été détruits. L’association des Droit de l’Homme en Turquie (HID) a publié au cours du mois de décembre 1994 les chiffres suivants relatifs aux violations des Droits de l’Homme : 164 arrestations, 326 morts dans les conflits, 17 personnes tuées par des inconnus, 21 morts en détention ou sous la torture, et 107 prisonniers d’opinions. Actuellement, la plupart des partis pro-kurdes cherchent des solutions aux conflits, en exil. L’Europe reste, pour les Kurdes comme pour les Turcs, la seule ouverture possible pour résoudre leurs problèmes. Que ce soit le PKK (signataire de la convention de Genève depuis le 24 janvier 1995) qui essaie de sensibiliser les autorités de l’Europe et des Nations-Unies, ou les différents partis turcs qui appuient leur gouvernement afin de pouvoir entrer dans la CEE. Le fait que la France, l’Allemagne et les État-Unis soient les principaux vendeurs d’armes de la Turquie, et de ce fait les premiers protagonistes de cette guerre, pourrait sembler en contradiction avec les demandes de résolution qui leur sont faites. Cette volonté d’adhésion à 1’Union européenne est motivée par le besoin d’un développement économique et industriel des métropoles turques. La Turquie souffre d’un grand déficit économique ; la cause principale est la politique militaire exercée, qui a eu comme conséquence de porter 1’inflation à 120%. L’ouverture vers 1’Europe implique, en contrepartie, un droit de regard sur la politique appliquée, et donc, un respect des lois «démocratiques», raison pour laquelle les partis kurdes soutiennent cette demande.

Mais la Turquie, elle, se trouve divisée en deux ; les partis pour le développement économique comme le YDH (Parti de la Nouvelle Démocratie) et le DYP (Parti de la Juste Voie, celui de Mme Ciller), qui ont déjà industrialisé certaines métropoles grâce au soutien européen (Alcatel, Telecom…), et de l’autre côté, l’armée et les fondamentalismes (RP, Parti de la Prospérité), qui détiennent les trois grandes métropoles (Ankara, Istanbul, Diyarbakir) et refusent toute adhésion à l’Europe. Dans les années 1970, le Refah (RP) s’était déjà intégré à la vie politique : il est à l’origine de la création de nombreuses écoles religieuses. En Turquie, les mouvements de fondamentalistes ne cessent de se développer et de prendre de l’importance dans les décisions de l’État, car il n’existe aucune résistance opposée.

Paru dans REFLEXes N°47, oct./nov. 1995

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