CILIP.
Le premier numéro de 1993 de la revue allemande trimestrielle Cilip, Bürgerrechte und Polizei (Les Droits des citoyens et la police) est consacré au sujet suivant : « L’extrême droite, le racisme et les réactions policières ».
Les articles de ce numéro analysent la problématique dans une double perspective : d’une part, celle des réactions policières à la violence d’extrême droite, surtout pendant la vague xénophobe que connaît l’Allemagne depuis 1991. Et d’autre part, celle des tendances extrémistes et racistes à l’intérieur de la police.
La revue met l’accent sur les évènements xénophobes de Rostock et d’ailleurs, et sur l’incapacité de la police à protéger les immigrés et les demandeurs d’asile. Divers autres aspects, entre autres des articles sur la Grande-Bretagne et sur la France, s’y ajoutent. Le bilan de l’emploi mortel des armes de policiers, effectué par la revue Cilip depuis 1974, se trouve également actualisé dans ce numéro (p. 79-85).
Cilip, Bürgerrechte und Polizei, n°44 (=1/1993), Berlin (CILIP-Verlag), mars 1993.
Le Dossier Georges Albertini. Une intelligence avec l’ennemi.
Albertini est une des personnalités les plus importantes de la quatrième république. Ancien collaborateur, cadre du RNP de Marcel Déat, il fondera la boite-à-penser anticommuniste la plus importante en France, l’Institut d’histoire sociale et la revue Est-Ouest. Conseiller des hommes politiques de tous horizons ; gaullistes, libéraux, socialistes anticommunistes, il retraitera et formera de nombreux activistes d’extrême droite : Alain Madelin, Nicolas Tandler, Xavier Raufer… Avec la mort d’Albertini et l’écroulement du bloc communiste, l’Institut et la revue sont en pleine restructuration.
Jean Levy, Le Dossier Georges Albertini. Une intelligence avec l’ennemi. Éditions l’Harmattan, 1992, 140frs.
Les nouvelles passerelles de l’extrême droite.
Thierry Maricourt vient de publier un livre sur l’extrême droite. Il montre comment l’extrême droite tente d’utiliser, d’infiltrer l’écologisme et les écologistes : pas de grandes révélations mais de solides chapitres, les racines de l’écologisme de droite, le mouvement raélien… L’essentiel de son livre est néanmoins consacré au révisionnisme (ou négationnisme) d’extrême droite et à son jumeau d’extrême (d’ultra) gauche. À lire avec intérêt. Notons aussi un intéressant chapitre sur le jeu trouble de la Nouvelle droite avec la Nouvelle gauche.
Thierry Maricourt, Les Nouvelles passerelles de l’extrême droite. Manya, 1993, 129frs.
Fascist Europe.
Député européen britannique, travailliste, Glyn Ford a activement participé par deux fois aux commissions d’enquête du Parlement européen (de 1984-1985 et 1989-1990) sur la montée du racisme et du fascisme en Europe. Glyn Ford a rédigé ce livre à partir des travaux de la deuxième commission l’enrichissant d’informations récentes. Le livre en anglais commence par une analyse en quelques pages de la situation de l’extrême droite dans chacun des pays d’Europe, puis suit un panorama du racisme dans chacun des pays, un bilan des actions communes entreprises depuis 1987 et les recommandations à diverses institutions européennes.
Glyn Ford, Fascist Europe. The Rise of Racism and Xenophobia. Pluto Press, 10£95.
Histoire de l’extrême droite en France.
C’est une histoire de l’extrême droite en France en huit tableaux qu’a rassemblé Michel Winock en faisant appel aux spécialistes de la question (Pierre Birnhaum, Pierre Milza, Jean-Pierre Azéma, Jean-Pierre Rioux, Pascal Perrineau). En huit articles, les auteurs retracent les moments forts de l’extrémisme de droite ; la contre-révolution, le boulangisme, l’affaire Dreyfus, les ligues, l’Action française, Vichy, le Front national. De bonnes synthèses sur ces questions.
Pierre Milza (sous la dir.) Histoire de l’extrême droite en France. Le Seuil, 1993, 135frs.
Extrême droite et antisémitisme en Belgique.
Les éditions belges de la Vie ouvrière viennent de publier cet intéressant ouvrage retraçant les histoires conjuguées de l’extrême droite et de l’antisémitisme en Belgique de 1945 à nos jours. En 160 pages, l’auteur dresse un panorama de l’extrême droite passée et actuelle en Belgique, de Thiriart (personnage-clé aujourd’hui disparu, penseur du communitarisme) au Vlaams Block et au Front national belge. À noter que l’auteur donne des précisions sur l’éditeur belge de l’Empire invisible de Tod, L. Van den Bossche : il s’agit d’un ancien du Front de l’Est sénile dont le nom est utilisé par son entourage pour couvrir nombre de revues néo-nazies.
Manuel Abramovicz, L’extrême droite et antisémitisme en Belgique. EVO, 130frs.
Néo-nazis
Le journaliste Michael Schmidt a mené durant quatre ans sa « terrible enquête », restituée comme un roman à suspense, au coeur du milieu néo-fasciste d’Outre-Rhin, aussi trouble que dangereux. Il a rencontré les idéologues, d’anciens SS, les leaders de groupuscules, assisté à des meetings, aux sessions des négationnistes de l’holocauste, écouté avec effroi les discours d’ordre, de fierté nationale, de haine xénophobe et antisémite. L’auteur rappelle notamment la « querelle des historiens »quant à la « spécificité ou non des crimes commis sous le Troisième Reich » qui agita son pays en 1986 et perçoit, y compris dans certaines interventions ou démarches du chancelier Kohl, du président von Weizäcker, de l’ex-ministre de l’Intérieur Schäuble, une volonté de « neutraliser, voire de désactiver le passé ». Grâce à de minutieuses investigations, il a cerné le vaste réseau de l’extrême droite étendant ses ramifications des États-Unis au vieux Continent, du Canada à la Russie. Qui s’étonnera qu’un Yvan Blot, candidat du Front national sur Strasbourg aux législatives du 21 mars, rencontra par exemple Bela Ewald Althans, yuppie de 28 ans, grand admirateur de Hitler, aspirant au rang de führer du NSDAP reconstitué ?
Le réalisateur dont Envoyé Spécial (France 2) diffusa en date du 12 décembre 1991 le reportage « La peste brune » dédie son ouvrage à « tous ceux qui font preuve de courage civique et se préoccupent avant tout d’humanité ». Quelques approximations (17 personnes, et non une douzaine, ont péri en 1992, victimes de la violence meurtrière de skinheads en Allemagne, le massacre à la bombe à la gare de Bologne eut lieu le 2 août, et non en septembre 1980…) n’enlèvent rien à l’authenticité de cet imposant document étayé d’innombrables informations, à lire aussi comme une pressante exhortation à la vigilance.
René Hamm
Michael Schmidt, Néo-nazis. Jean-Claude Lattès, 1993 (438 pages), 139 francs.
Autour de Wilhem Heitmeyer, un groupe de recherche a publié les recherches sur ses travaux effectués en Allemagne à Bielefeld pendant une période de cinq ans (1985-1990) sur 31 jeunes gens de 17 à 21 ans pour étudier le développement de leur attitude politique. Heitmeyer avait déjà publié plusieurs ouvrages sur les jeunes et l’extrême droite.
Cette étude est basée sur des interviews très longues, répétées chaque année pendant les cinq ans de la recherche. Il s’agissait d’étudier les impacts de différents modes de socialisation et d’intégration sur les convictions politiques.
En raison de cette conception très large, l’étude livre des indications intéressantes pour comprendre l’apparition des convictions d’extrême droite chez des jeunes ; elle confirme des facteurs bien connus, comme le degré d’intégration sociale et économique, ou la situation familiale. Mais en même temps, elle montre qu’il est nécessaire de prendre en compte la diversité des influences qui déterminent une conviction politique et la multiplicité des processus de développement d’une attitude politique. Ce livre constitue donc une contribution importante à l’explication des attitudes d’extrême droite dans toute leur complexité.
Wilhem Heitmeyer et al., Die Bielefelder Rechtsextremismus-Studie Weinheim (Juventa-Verlag), 1992, 612 pages.
Hartmut Aden
Mis en ligne le 10 décembre 2006
Cet article est libre de droit, mais nous vous demandons de bien vouloir en préciser la source si vous en reprenez les infos : REFLEXes http://reflexes.samizdat.net , contact : reflexes(a)samizdat.net
Les commentaires sont fermés.