REFLEXes

Bruno Gollnisch : l’ombre

Bruno Gollnisch est né le 28 janvier 1950 à Neuilly, au sein d’une famille bourgeoise : élève à Janson-de-Sailly, il poursuit ses études en droit à Nanterre. Il fait alors ses premiers pas militants au sein de la Fédération nationale des Étudiants de France, qui se voulait une anti-UNEF. il y rencontre Marie-France Charles, future madame Stirbois, et, au sein des Comités unis de soutien au Sud-Vietnam, Roger Holeindre. Enfin, en novembre 1972, il assiste au premier meeting du Front national. Après avoir fait son service militaire dans la marine en tant qu’officier, il retrouve le chemin de la fac, mais au Japon, où il est attaché de recherche à la faculté de droit de Kyôto. De retour en France, il entame une double carrière en tant qu’avocat et au sein de l’université.

Pendant dix ans, son militantisme se limite au Cercle Renaissance de Michel de Rostolan (auquel il adhère en 1973), puis à quelques contacts avec le Cercle National des Indépendants (CNI), la mouvance royaliste et le milieu catholique intégriste. Puis il entame une carrière politicienne en devenant l’assistant parlementaire de Jean-Louis Beaumont, un député particulièrement réactionnaire, de 1978 à 1980. Marié en octobre 1981 à une Japonaise, docteur en droit, il est professeur de droit japonais à l’université Lyon III à partir de 1981 ; en 1984, il est doyen de cette faculté.

Et c’est à ce titre que, contacté par le mari de son ancienne amie, Jean-Pierre Stirbois, il accepte de présider (c’est-à-dire de servir de caution de respectabilité) un meeting animé par Germaine Burgaz, vice-présidente du FN, meeting qui réunit plus de 2000 personnes. Dès lors, son ascension dans l’appareil du Front est fulgurante : secrétaire départemental du Rhône en 1984, il est 81e sur la liste FN pour les élections européennes de la même année et participe à la rédaction du programme du Front. Deux ans plus tard, en 1986, il est élu au Comité central et au Bureau politique, et il obtient ses premiers mandats (député et conseiller régional) ; puis il devient député européen en 1989. Il se fait remarquer dans ces diverses assemblées par son goût prononcé pour l’agitation et les petits scandales.

En 1990, il invite à la Foire internationale de Lyon Franz Schönhuber, ancien Waffen SS et chef de file des Republikaner, un parti d’extrême droite allemand. Scandale à la Foire bien sûr, mais aussi au FN, où certains (Mégret, pour ne pas le citer), qui cherchent désespérément à présenter une image respectable du FN, trouvent l’initiative regrettable. Notons à ce propos que Gollnisch est l’un des rares cadres du FN à se risquer dans le domaine réservé à Le Pen, les relations internationales : ainsi, en 1996, il se rend à Moscou pour un congrès de Jirinovski, et plus récemment, en mai 2001, il a répondu à l’invitation du mouvement nationaliste polonais Alternatywa.

En 1993, Jean-Marie Le Pen parle de Gollnisch comme d’un «dauphin» potentiel, au même titre que Mégret ou Lang. Il faut dire que le grand Bruno reste toujours dans l’ombre de Le Pen, prenant garde de ne jamais le contrarier. Ainsi, à la mort de Jean-Pierre Stirbois en 1988, des cadres importants du Front (Collinot, Baeckeroot, Touzé…) le pressent pour qu’il se porte candidat au poste de secrétaire général, pour contrer un Mégret jugé un peu envahissant : Gollnisch refuse, de peur de froisser Le Pen, qui désigne alors Carl Lang, un personnage plus consensuel. Au sein du Front, Gollnisch s’est toujours appuyé sur la frange catholique intégriste (Chrétienté-Solidarité, le journal Présent) pour des raisons à la fois personnelles et stratégiques : malgré une volonté affichée aujourd’hui de maintenir les «cathos tradis» à leur place, ce soutien ne s’est pas démenti, comme le prouve sa participation à l’université d’été de Chrétienté Solidarité en juillet 2000.

Gollnisch, on l’a vu, a établi son fief dans la région lyonnaise. Lors de la scission de 1998, il est exclu par les mégrétistes de la fédération FN 69, une association créée en juin 1986 dont il était le président. Il fonde alors l’AFFN 69 en septembre 1999, afin de conserver une base locale. Il est d’ailleurs nommé sans surprise secrétaire départemental de la fédération du Rhône en 2000.

Mais c’est surtout au niveau national que son rôle au sein du FN s’est affirmé : outre la présidence du Cercle national de la Fonction publique (contrôlé par l’EML) et la responsabilité des argumentaires sur les questions d’éducation, il est régulièrement élu au comité central depuis 1986 (en troisième position en mars 1990), pour finir Secrétaire général en octobre 1996, lorsque Carl Lang jette l’éponge. Resté fidèle à Le Pen, il est nommé délégué général en novembre 1999, et devient ainsi le véritable numéro deux du Front : dernière responsabilité en date, il fut le directeur de campagne de Le Pen pour les présidentielles de 2002.

Enfin, en bon apparatchik, il a su profiter des opportunités que lui offraient son poste politique : il a été actionnaire jusqu’en décembre 1999 de la SA Telegone fondée en avril 1988, devenue une SARL en 1992, basée sur Lyon, dont le but est «la communication sous toutes ses formes», et qui est actionnaire de la SCI de la Liberté, propriétaire des locaux du FN Rhône-Alpes…

NOTA : La majeure partie des informations liées à la jeunesse de Bruno Gollnisch sont empruntées à Michel Soudais,Le Front national en face, Flammarion, 1996.

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