REFLEXes

Le syndrome Waldheim

Dès l’annonce de la coalition ÖVP-FPÖ, les réactions des officiels ont plu de tout côté : Israël voulait rappeler son ambassadeur, tous les pays européens ont blâmé l’Autriche d’une seule voix, certains ont voulu voir dans le nouveau gouvernement autrichien le signe indéniable de la prédisposition des peuples alpins et germaniques au fascisme[1], et des résultats électoraux, on est directement passé dans les journaux français à l’obsédante question des sanctions européennes. À partir de ce moment-là, l’actualité autrichienne s’est résumée à cela, quelles sanctions l’Union européenne allait-elle mettre en place, comment allait-elle s’y prendre, Chirac avait-il eu des mots trop durs, Martine Aubry et son homologue belge avaient-elles eu raison de quitter la salle… bref toutes questions fort passionnantes, mais qui ont totalement occulté ce qui se passait réellement en Autriche.

Les sanctions européennes ont peut-être leur bien-fondé (quoique, quand on voit que le nouveau gouvernement autrichien met en place avec succès une politique d’immigration qui fait certainement pâlir d’envie bien des pays-membres de Schengen) ; elles servent malheureusement de point de focalisation à l’attention internationale et permettent de masquer l’absence de sanctions contre la Russie et le fascisme réel mis en application en Tchéchénie par exemple. Bien plus, le gouvernement ÖVP-FPÖ, et Haider en tête même s’il n’en fait pas partie, s’en servent habilement pour détourner l’attention de ce qui est véritablement en train de se passer en Autriche. Qui a en effet entendu parler des quatre immigrés décédés[2] les trois dernières semaines de mai ? Quel journal français s’est fait l’écho des arrestations extrêmement brutales qui ont eu lieu en mars pendant les manifestations d’opposants au gouvernement et qui ont été le fait d’une nouvelle unité de police[3] encore au stade expérimental et composée de ce fait de volontaires bénévoles qui prennent sur leur temps libre pour aller casser du manifestant antifasciste ?

En fin de compte, le plus important est surtout d’être solidaires des antifascistes autrichiens et de constituer avec eux une résistance antifasciste efficace et coordonnée, au lieu de prendre des airs de vierge effarouchée à chaque mot de Haider, sachant que tous les membres de ce gouvernement sont à surveiller de près, ainsi que tout ce qu’ils vont tenter de mettre en place dans les mois à venir.

  1. Libération, 5 février 2000.[]
  2. Deux d’entre eux ont été retrouvés morts dans leur cellule, un autre a été abattu par la police alors qu’il sortait d’une discothèque, et le dernier, un enfant de 5 ans, est mort dans des circonstances encore inexpliquées.[]
  3. Il s’agit bien sûr du SEK.[]
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